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mars 2004

1851 : 10 000 Drômois se révoltent. (fiche)
par

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Notes de lectures à partir de quelques citations

Dix mille Drômois se révoltent.

de Robert Serre

L’insurrection pour la République démocratique et sociale

Préface de Maurice Aghulon Professeur honoraire au Collège de France (Éditions Peuples / Notre Temps - Imprimerie du Crestois - 26400 Crest - Novembre 2003)

Quatre parties classiques : 1) La montée de la colère, 2) L’insurrection, 3) La répression, 4) Comprendre et se souvenir. 400 pages illustrées par tout un appareil de 200 documents écrits et icônographiques souvent inédits.

Relaté dans la première partie d’un récit passionnant par la densité de sa documentation et son style - La montée de la colère -, l’épisode du procès des insurgés marseillais donne le ton. Ces insurgés, arrêtés suite à l’échec du soulèvement des 22 et 23 juin dans la Cité phocéenne pour lesquels les autorités ordonnent qu’une partie d’entre eux soient jugés devant les Assises de la Drôme, témoignent de la fragilité du climat social en France en 1849 consécutive aux massacres des journées de juin 1848 à Paris. « 700 chasseurs de Vincennes sont transférés à Valence pour garantir que l’ordre ne sera pas troublé pendant le procès. Le problème est qu’il faudra loger tous ces inculpés et les prisons du chef-lieu sont pleines. Pour laisser place aus 153 marseillais attendus, l’idée du préfet est de transférer les détenus de Valence : les prévenus à Romans, les condamnés /.../ ainsi que les soldats insubordonnés à la tour de Crest /.../. À Valence le procès des insurgés marseillais dans l’église Saint Jean risque aussi d’inspirer de mauvaises pensées : « la foule se presse, repoussée par de nombreux agents de police et par la troupe rangée en battaille /.../ Les accusés sont amenés par voitures en convois successifs sous escorte de détachements de gendarmerie et de lanciers à cheval. Les accusés crient au détour de chaque rue : « Vive la République ! ». « De même, le lendemain, ils agitent les bras hors des vasistas... » pp. 46 / 47.

Aux élections législatives des 13 et 14 mai 1849, « le résultat confirme les impressions de campagne : dès le premier tour, les sept candidats de la Montagne, recueillant entre 43 689 et 41 104 voix, sont élus. Le succès est net /.../ Même les électeurs militaires comptés séparément, donnent une large majorité aux républicains sociaux. » p. 50.

Mouchards, délation, répression, état de siège s’abattent sur la Drôme par le préfet Ferlay qui voit partout naître des complots suscités ou imaginaires, obsédé par la couleur rouge et dont la philosophie se concentrait dans cette déclaration : « Il suffit de montrer les dents à ces gredins pour les rendre souples comme des gants. » Exemple : « C’est ainsi qu’à Saint-Marcel-les-Sauzet, (village situé entre Montélimar et Sauzet) deux notables, le riche propriétaire Malgras et le manufacturier Culty, dénoncent le maire Chabas et un groupe de gardes nationaux pour avoir le 1er mai 1849 défilé et dansé la farandole en portant un drapeau rouge « surmonté d’un bouquet de frigolette », tout en criant : « vive les Rouges et mort aux Blancs ! Nous les fouttrons à la frigolette ! ». (Explication : la frigolette ou farigoule, est le thym, « une plante de nos montagnes que l’on met dans le sang du cochon pour donner meilleur gout au boudin », ce qui donnait tout son sens au cri des manifestants. ») p. 58. « La fête des Bouviers de Sauzet le 30 juin 1850, est marquée par des cris et chants séditieux poussés par des jeunes gens parcourant le village : « Nous établirons la République rouge / Le poignard à la main / Allons, francs lurons / Portons le bonnet rouge... » Benoît et Gauthier sont arrêtés ». p. 61.

Par l’humour sous toutes ses formes, la résistance devient un mode d’existence populaire avec les banquets, les manifestations clandestines ou dévoyées comme à Dieulefit où « ...les ouvriers fêtent le Carnaval en défilant aux cris de Vive Ledru-Rollin ! Vive Barbès ! ». Arraché par l’insurrection de février 1848, le suffrage universel entre les mains des « Rouges » devient une arme redoutable pour la légalité des « Blancs » au pouvoir qu’il convient d’adapter : la loi électorale du 31 mai 1850 y pourvoit « ...qui purifie les collèges électoraux de cette horde de vagabonds, de misérables et de repris de justice que toute la sollicitude de l’autorité et de la justice ne parvenaient pas toujours à en éloigner ; il rend au suffrage universel toute sa moralité, toute sa force. » p.81. Résultat : « La Drôme est amputée d’environ 20 000 électeurs sur 91 000 soit 23% des inscrits. » p.82.

Dès lors, « Le dilemne : résister jusqu’aux élections ? ou prendre les armes ? » s’impose à un peuple qui rejette la répression de ses aspirations à une justice sociale que la République laissait espérer. p.93. Partout, dans les moindres villages, chants séditieux et socialistes, proférés en toute occasion par les jeunes gens, font courir les gendarmes à leurs trousses : « Le 27 juin 1851, les frères Gauthier, cultivateurs de Sauzet, sont condamnés par contumace par le conseil de guerre de Lyon à deux ans de prison et 550 francs d’amende pour chants séditieux. » p. 97. Dans ce contexte de répression et de « mouchardage institutionnalisé... », « ici et là », la colère éclate ... une émeute à Saulce, le 2 septembre 1850... La grève des tisseurs de Dieulefit en février 1851 ».

Résultat : « En cet automne 1851, l’exaspération est à son comble. La dictature policière, la suppression progressive des libertés élémentaires et la répression chaque jour plus féroce font grandir la colère des populations qui n’attendent qu’un signal pour sortir les fusils cachés, les fourches et les faux... Ferlay... sent bien que cet orage qu’il sent venir pourrait éclater violemment : il demande aux maires de se tenir prêts à enlever les cordes et le battant des cloches. » Fin de la première partie ! À vous la suite passionnante de cette difficile marche à la République sociale entravée par le coup d’État du 2 décembre 1851 de Napoléon le Petit auquel 10 000 Drômois (qui) se révoltent répondent les armes à la main.

Michel Barbe

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